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Note d'intention

Observer la danse, l'autre et le monde, au rythme des plantes et des rochers, exige une autre notion du temps. A travers ces Paysages sans-titre, je souhaite trouver et affirmer cette patiente vitesse minéro-végétale dans tous les aspects de notre recherche et de nos créations.

 

Untitled landscapes est un projet artistique évolutif, un espace et un temps dédiés à la culture d'une pratique artistique personnelle durable, qui tient compte du cadre rural dans lequel je vis désormais. Avec l’équipe de ce projet, si la danse est notre lieu de rencontre, notre processus pseudo-archéologique implique également d'écrire, lire, filmer, dessiner, visiter des sites, interviewer des "experts locaux" de ces sites, observer le paysage et pratiquer en plein air. Cet entrelacement de pratiques mène à des performances ou à d'autres rendus publics, et donne de l'espace à la pratique et à l'apprentissage de nos propres danses.

 

Le contraste entre ma vie actuelle dans un village rural en Côte d’Or et des années de développement artistique dans les pôles culturels animés que sont New York puis Paris est un catalyseur important : ralentir suffisamment pour considérer l'importance de la danse et de la création dans un contexte où "culture" signifie "faire pousser des choses". Je comprends l'importance de ma position d'entre-deux quand je me déplace librement des vestiges de Dracy, un village médiéval abandonné près des falaises, à La Corvette, studio de danse dans notre jardin en contrebas.

 

L'idée du projet Untitled landscapes est née après avoir passé du temps à danser et à réfléchir parmi les ruines de Dracy[1]. Dans ce lieu, j'ai imaginé une rencontre entre deux doux génies dont le travail et la vie m'ont énormément inspiré, la chorégraphe Simone Forti et le paysagiste Gilles Clément. Leur rencontre fictive mêle les origines, les histoires, les géographies. Elle renouvelle ma perspective sur ce que sont le lieu et l'appartenance. Dracy est un lieu public auquel je m'identifie, mais qui ne m'appartient pas. Là-bas, je sens que moi - et tous ceux qui l'écoutent - appartenons au sol, aux plantes, aux rochers, à l'air, aux oiseaux.

 

La temporalité prolongée et la structure ouverte du projet Untitled landscapes cherchent à répondre à un désir de développer et pratiquer différemment. Je souhaite contextualiser mes questions autour de la danse de manière plus planétaire et en même temps plus locale. Les va-et-vient entre ces trois protagonistes qui se ressemblent, que sont le village abandonné de Dracy, le Jardin en mouvement[2], de Gilles Clément et la Logomotion[3]  de Simone Forti, génèrent un environnement dynamique qui me semble pertinent pour développer ma pratique artistique dans des directions encore inexplorées.

 

 

[1]             Attesté en 1285 puis abandonné définitivement en 1420, Dracy fut un village d'une centaine d’habitants à sa période la plus peuplée. Après de nombreuses fouilles entre 1965 et 1977 ce site archéologique est aujourd’hui en grande partie recouvert par la végétation. Ce sont les habitants de la Commune de Baubigny où j'habite qui se chargent de l'entretenir une ou deux fois par an. 

[2]             Le Jardin en mouvement est un concept de Gilles Clément pour désigner un type de jardin dans lequel les espèces végétales peuvent se développer librement, et plus généralement une philosophie du jardin qui redéfinit le rôle du jardinier, centré sur l’observation et suivant une éthique de coopération avec la nature.

[3]             La Logomotion élaborée par Simone Forti est une forme de danse-narration improvisée dans laquelle le mouvement et les mots jaillissent spontanément d'une source commune.

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